Avant-propos
La généralisation de l’accès à Internet a ouvert en grand les accès à la culture, au savoir et à l’information sous forme numérique. Le plus souvent d’apparence gratuite, l’information circule très rapidement à travers de multiples supports et réseaux. Si la question de la fracture numérique a été traitée depuis une quinzaine d’année, c’est la question du contenu qui est aujourd’hui au centre de l’attention : il faut lutter contre les Fake News, les théories du complot, les rumeurs, nous dit-on.
Les réseaux sociaux sont directement mis en cause. En contrepoint, les médias dits traditionnels font état d’une méfiance, voire d’un rejet : intérêts financiers, dépendance à l’égard de la publicité, unicité des points de vue, manque de diversité sociale et ethnique sont notamment critiqués.
Que ce soit sur internet ou dans ces médias traditionnels, la rapidité des flux, l’absence de hiérarchisation et de contextualisation de l’information, à laquelle peuvent s’ajouter des intérêts non exprimés (communication, marketing, financiers, partisans, etc.) brouillent les pistes et rendent difficile l’identification de ce qui circule sous nos yeux, entre nos mains.
C’est pourquoi il nous paraît nécessaire de revenir aux fondamentaux : d’abord s’intéresser au manque de connaissances à l’égard de ce qu’est l’information, d’où elle provient, qui la diffuse, comment et pourquoi. Il s’agit de fournir des outils d’analyse et de critiques qui permettront à chacun de distinguer ce qui relève de l’information vérifiée, sourcée, mesurée, et ce qui appartient aux domaines de la communication, de la vente ou du divertissement. Faire de l’éducation aux médias, c’est offrir des clés de questionnement et d’analyse de ce que nous recevons quotidiennement : décoder l’information, analyser les contenus, leur provenance, leurs sources, leurs intentions, cerner leurs limites.
En plus de former à une mise à distance critique des outils numériques et informationnels via l’analyse des pratiques, l’un de moyens privilégiés d’intervention est d’inviter le public à créer son propre média. Tout d’abord pour montrer que la prise de parole publique est un exercice accessible à toutes et tous. Un exercice légitime qui implique un travail, une mesure, une reflexion sur chaque mot, chaque image, chaque son qui sera publié et son poids.
La démocratisation de l’accès à une parole publique à forte diffusion (via le numérique) implique de prendre la mesure de la responsabilité qu’elle implique et de ses impacts potentiels, ainsi que la nécessité d’une construction étayée, organisée et rationnelle des opinions exprimées.
En favorisant cette approche active et créatrice, en particulier auprès de jeunes ayant peu accès à la parole publique, il s’agit également de redonner de la valeur à cette parole, de lui laisser prendre sa place au sein de la vie démocratique.
Enjeux
Nous souhaitons faire des publics auprès desquels nous intervenons des acteurs de la circulation des savoirs liés aux médias. L’objectif est d’apprendre à questionner les médias, à nourrir des réflexions collectives, mais aussi à apporter des grilles d’analyse, pour faire des médias une question essentielle et non annexe. Notre ambition est aussi de renforcer la connaissance du système démocratique, du rôle et du fonctionnement des médias au sein de celui-ci.
Il s’agit de donner des clés de compréhension et d’analyse pour appréhender le fonctionnement du système médiatique et pour comprendre le monde qui nous entoure (comment analyser un article de presse, une image, une vidéo…). Mais aussi de proposer des moyens d’agir en se constituant en média, en participant à une circulation maîtrisée de l’information et des opinions. C’est un moyen d’exercer sa citoyenneté et de lutter contre les inégalités sociales, spatiales ou de santé (handicap par exemple) par le prisme de l’éducation, de l’apprentissage, de la création et de la circulation des savoirs.
C’est une façon aussi de développer la mixité sociale en provoquant des rencontres intergénérationnelles, d’individus d’horizons différents, et ainsi, de favoriser une co-construction qui reflète la richesse des échanges effectués.